Nous faisons le constat d’une nouvelle donne, qui se traduit au sein du groupe Capgemini par un double mouvement pervers, manœuvré en silence :

  • Déposséder le salarié de son travail,
  • En faire un actionnaire forcé.

Déposséder le salarié de son travail

Nos valeurs sont issues d’une organisation du travail en voie d’extinction : le travail était mieux valorisé par la reconnaissance de l’effort ou de la performance, et les augmentations salariales étaient plus nombreuses. Le partage d’un but et de valeurs communes donnait sens au travail en équipe : satisfaction du client, travail de qualité, atteinte d’un objectif difficile, dépassement des conflits… Chacun pouvait se valoriser par la discussion, l’investissement personnel et la transmission de savoirs et de compétences. Cela était particulièrement le cas dans les services publics.

Bien sûr ce tableau n’était pas toujours légion mais il semble bien que la considération de notre travail soit de plus en plus difficile à trouver. Pourquoi ?

miroirLe travail apparaît dorénavant détaché du réel, et dicté par des considérations sans rapport avec le bon sens : directives managériales incompréhensibles, ordres des clients toujours plus nombreux et urgents. Pris entre les deux, le salarié a du mal à s’approprier son travail, et à pouvoir se dire « j’ai fait du bon boulot aujourd’hui » ou « j’ai plaisir à travailler avec mes collègues ».

La plupart des salariés se valorisent par leur travail, dans lequel ils passent l’essentiel de leur temps d’activité : dans la nouvelle donne, comment pouvons-nous continuer à nous valoriser, et éviter la souffrance psychologique, voire la dépression ?

Le salarié-actionnaire forcé

Le collectif disparait et la reconnaissance du travail en équipe aussi. Cette volonté d’individualisation se propage à toute la politique RH : contrats de travail, salaires, formation…

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La communication d’entreprise influence ou manipule chaque salarié, en valorisant la cupidité, afin de le convaincre qu’il a tout intérêt à profiter au maximum du système individualisé, voire même à lui faire croire que c’est sa seule possibilité. Le but sous-jacent est là : faire perdre l’idée du collectif au profit de l’individuel, en donnant l’illusion d’un « vivre ensemble » là où nous sommes en fait « isolés ensemble » !

L’individualisme a ainsi pour effet d’isoler, dans une solitude souvent invisible, et d’empêcher de penser sa propre situation personnelle. Côtés salaires l’individualisation fonctionne à bloc : seuls les « Key People » recherchés sur le marché du travail bénéficient d’augmentations. Pour les autres, la seule solution pour maintenir son niveau de vie est celle imposée aujourd’hui par la Direction Capgemini : « Votre travail est dicté par la finance : profitez-en au lieu de la combattre ». Après un long « lavage de cerveau » médiatique, vous finirez sans doute par « aimer votre bourreau »…

Capital inhumain … surtout pour les petits salaires

manipulation La volonté de notre direction est claire : valoriser exclusivement la finance internationale : le royaume de la perversion et de la toute-puissance, un système mafieux qui passe par-dessus les Etats (Enron, Lehman Brothers, Goldman Sachs, Clearstream, Barclays, HSBC…). Sogeti renonce aux augmentations de salaires, et en compensation l’entreprise incite ou force les salariés à devenir actionnaires. Elle encourage de façon très insistante avec le plan d’actionnariat salarié ESOP (une vingtaine de mails reçus en 2014), et elle force avec l’attribution obligatoire d’actions en juillet dernier.

Cette manœuvre est d’autant plus perverse qu’ESOP est (ou apparaît) très juteux et permet de multiplier plusieurs fois sa mise en quelques années, une performance financière qui dépasse les placements financiers du grand public. Ne soyons pas dupes : être séduit et souscrire à Esop, c’est comme être séduit puis maltraité par une belle garce, ou un beau salaud.

Mais aujourd’hui, qui a les capacités d’épargner via ESOP ? Les plus gros salaires évidemment. On accentue donc l’inégalité de pouvoir d’achat entre les bas et les gros salaires dans l’entreprise. Les petits salaires se retrouvent donc culpabilisés et totalement exclus de cette fausse politique salariale.

Le plus indécent, c’est que cette nouvelle donne est imposée par touches successives, en silence, dans un non-dit dévastateur. Elle n’est pas assumée par le patronat qui, au contraire, prône dans ses communications des valeurs et une éthique d’entreprise angélique comme « l’honnêteté », « la solidarité », « la confiance ». Ceci est fait sans complexes, avec un cynisme difficilement acceptable pour ceux qui subissent au quotidien la détérioration du dialogue avec leurs managers…

Pour chacun d’entre nous, il apparaît nécessaire de s’interroger.

Qu’est-ce qui est le plus important ? La valeur du travail ou la valeur du titre en bourse… Que voulons-nous mettre au cœur de notre emploi : un métier satisfaisant ou le capital qui rapporte ?

C’est tout l’enjeu de notre avenir collectif.

Tract Capital Humain

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